QUAND TOUT EST SI NOIR
- Philippe Broda
- 8 mars
- 3 min de lecture
Jeudi 17 octobre 2024, 19h30. Au quartier général de LFI, le « brain trust » de Mélenchon s’active autour du chef, et ce n’est pas pour préparer le repas de chabbat. Les téléscripteurs crépitent. Un peu à part, concentré sur la mise en service d’un ordinateur, Sébastien Delogu se répète à lui-même : « Le fil rouge sur le bouton rouge, le fil bleu sur le bouton bleu ».Quand soudain…
Mélenchon – Les amis, une dépêche… Je vous lis… Une très mauvaise nouvelle… La mort de Yahya Sinwar semble se confirmer.
Panot – Quelle est ta source ?
Mélenchon – L’AFP. Le porte-parole de l’armée sioniste a répété sa précédente déclaration : « tant que l’on n’aura pas les résultats des prélèvements ADN, le jugement restera suspendu ». Mais les journalistes sionistes bien informés disent qu’il n’existe plus le moindre doute.
Panot – Les Israéliens sont des menteurs pathologiques. Pourquoi les croirait-on ?
Guiraud – Radio Tel Aviv ment, radio Tel Aviv est allemand.
Mélenchon – Nous attendrons bien sûr les déclarations du Hamas. Cependant, il est arrivé dans le passé que la Résistance se trompe. Et puis, de toute façon, il faut se préparer au pire…
Caron – Attention, Jean-Luc ! Je suis aussi bouleversé que toi mais fais gaffe tout de même : en reculant brusquement tu as écrasé avec ton pied un être vivant, une mignonne petite punaise.
Le silence s’installe pendant une dizaine de secondes. Guiraud le désinstalle en brandissant un communiqué de presse : « Vous vous trompez, camarades, c’est Nasrallah qui est mort et c’est confirmé. Regardez. A moins que vous ne parliez de Haniyeh ? »
Mélenchon – David, d’abord, je ne me trompe jamais. Ensuite, tu sèmes la confusion. Bon, Mathilde, veux-tu bien donner un manga à David ? Qu’il nous laisse travailler sérieusement. Merci.
Boyard – C’est pas pour défendre David mais, avec tous ces dirigeants éliminés, on y perd son baratin.
Mélenchon – Son latin, son latin.
Hassan – Je rebondis sur ce qui vient d’être constaté. Une fois réunis, tous ces cas de chefs sauvagement exterminés…
Mélenchon – … constituent un crime de « chéficide ». Louis, ne t’affole pas, c’est normal que tu ne connaisses pas. C’est une invention de Rima. Le souci est qu’Israël serait flattée d’une accusation.
Caron – Alors, on reste sur méga-génocide.
Une porte claque avec force. C’est Adrien Quatennens qui fait son apparition dans son style coutumier.
Mélenchon – Adrien. Tu arrives au bon moment. Manu, un topo rapide, pour remettre la mosquée au milieu de la casbah.
Bompard – OK. Hier, trois résistants sont identifiés par Tsahal. L’un s’enfuit seul. Plus tard, il est à nouveau repéré puis tué. Ce matin, en retirant son corps des décombres, une ressemblance avec Sinwar est apparue. D’où les tests ADN.
Caron – Nous devons dire que cette élimination est plus qu’un crime. C’est une faute. Cela montre que les criminels sionistes sont à la dérive, qu’ils perdent la tête.
Mélenchon – Et nous, nous ne devons pas perdre la nôtre ! Hier encore ; nous nous moquions de l’impuissance d’Israël à atteindre les dirigeants du Hamas.
Quatennens – Mais quels arguments mobiliser, Jean-Luc ? Explique-nous.
Mélenchon – Attendez, attendez. C’est quoi ces images ?
Les yeux de tous se tournent vers l’écran de l’ordinateur central. On y voit un drone s’introduire dans un bâtiment éventré et filmer un individu assis dans fauteuil, qui dissimule son visage et qui semble épuisé.
Boyard – Les images sont vraiment mauvaises. Même pas un gros plan. Qu’ils sont nuls les sionistes.
Panot – Et puis quelle résistance héroïque. Malgré son martyre, il tente de détruire le drone.
Guiraud – Ne peut-on présenter Sinwar comme un modéré ? Il a bien fait une déclaration un jour dans laquelle l’extermination des Juifs n’était pas mentionnée.
Quatennens – Oui, certainement. Seulement, pour présenter Haniyeh sous un jour sympathique après son élimination, nous l’avons comparé à Sinwar l’extrémiste. Dur de créer un requin blanc végétarien…
Hassan –Dressons un parallèle entre aujourd’hui et le 17 octobre 1961, deux ignobles massacres.
Mélenchon – Un, s’il a été tué, c’est hier. Le 16. Et deux, comparer l’assassinat d’Algériens manifestant de façon pacifique à la mort de celui qui a été surnommé le « boucher de Khan Younès » ?
Caron – Ouh la, attention ! Je n’aime pas les bouchers, moi. C’est un métier qu’il faudrait interdire.
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