SUBLIMINAL
- Philippe Broda
- 30 août
- 3 min de lecture
« Génocide », « Apartheid », « Famine ». Les grands mots servent parfois de grands remèdes au matraquage anti-israélien dans les médias internationaux. Cependant, il emprunte des voies plus discrètes, plus insidieuses, depuis des lustres. Le diable se niche dans les détails. En voyant ce conditionnement des esprits, comment en effet ne pas en déduire que Satan l’habite ?
La manipulation commence avec la géographie. La désignation de la Cisjordanie n’a aucun équivalent dans la présentation des espaces politiques dans le monde. L’adjectif « occupée » lui est souvent accolé. Le public est invité à compléter lui-même « par Israël » ou toute formule renvoyant à l’Etat juif. Cela évite par exemple un pénible « En Cisjordanie occupée par la soldatesque sioniste, voici les événements de la nuit » qui ne manquerait pas d’être lassant à force. Le procédé relève de l’ellipse. On pourra toujours estimer que ce n’est pas faux mais il s’agit malgré tout d’une exception. Ainsi, quand il est question du Donbass, aucun journaliste ne s’amuserait à livrer l’information de la manière suivante : « Au Donbass occupé, voici les événements de la nuit ». C’est d’autant plus paradoxal que la Russie ne cache pas ses vues sur le Donbass tandis que, selon le principe « paix contre territoire » de l’ONU, l’occupation de la Cisjordanie et Gaza par Israël est légitime tant que les Palestiniens ne reconnaissent pas son existence. Or, même si Bibi Netanyahou ne semble pas prêt à quitter les territoires conquis en 1967, les dirigeants palestiniens, eux, ont toujours refusé de remplir leur obligation.
L’idée a peut-être du bon malgré tout. Outre les conflits comme au Donbass, la liste de l’ONU des territoires non autonomes pourrait éclairer le public. A quand un « En Polynésie occupée (par la France) » dans les médias ? Ce serait mignon. Ce petit jeu avec loquet rouge-occupé contre vert-libre n’est toutefois pas sans danger. Il évoque inévitablement les lieux d’aisance. Laissons cela. En revenant à la Cisjordanie et en pinaillant un peu, on constate de surcroît que, depuis les accords d’Oslo, la Cisjordanie est divisée en trois zones. Dans la zone C, qui en recouvre environ 60 %, Israël exerce toutes les compétences, notamment sur la sécurité des biens et des personnes. L’occupation est entière. Dans la zone B, qui recouvre 22 % de la Cisjordanie, Israël et l’Autorité palestinienne partagent les responsabilités. Enfin, dans la zone C, qui recouvre les 18 % qui restent, c’est l’Autorité palestinienne qui contrôle tout. Israël n’intervient pas. Dans ces circonstances, s’il est vraiment important de qualifier la situation en Cisjordanie, et même si l’on considère qu’une occupation partielle entre dans la catégorie occupation, une différentiation s’impose. De sorte que les journalistes rigoureux devraient plutôt s’exprimer de cette manière : « En Cisjordanie occupée à 82 %, voici les événements de la nuit ».
Un autre mot, « terrorisme », est révélateur des intentions des hommes de presse. La définition du Larousse est extrêmement large puisqu’un « acte de violence » visant à exercer une « pression sur un gouvernement » en fait partie. De ce fait, l’attaque d’un mouvement de guérilla contre une armée mériterait d’être décrite comme terroriste. A se demander si une manifestation non autorisée n’est pas un acte terroriste. Heureusement, l’ONU vient opportunément à notre secours en resserrant la définition. Avant de poursuivre, il est temps de réparer une injustice. Beaucoup critiquent l’ONU en prétendant qu’elle ne sert pas à grand-chose C’est faux, elle fournit des définitions et ce n’est pas rien. C’est plus dans leur utilisation qu’elle pèche. Pour l’organisation internationale, le terrorisme englobe les « actes criminels, notamment ceux dirigés contre des civils » afin de « causer la mort ou des blessures graves ou la prise d’otages dans le but de semer la terreur parmi la population ». Sans le moindre doute, les médias devraient présenter le massacre des kibboutzim ou de la rave party le 7 octobre comme une attaque terroriste. Beaucoup s’y soustraient avec délicatesse.
Le refus d’appliquer l’appellation « terroristes » aux membres du Hamas, qui se vantent d’être les auteurs de cette boucherie, est supposé partir d’une bonne intention. Une connotation péjorative est associée au mot. Si l’on décrit les événements tels qu’ils se sont déroulés avec la définition de l’ONU, on risque d’induire le public à penser du mal du Hamas. Or, il convient de rester neutre et surtout de ne pas prendre parti. C’est pourquoi les termes « militants » ou « activistes » sont régulièrement employés. Cette pratique sous-entend une découverte extraordinaire : les individus qui commettent des meurtres sur des civils israéliens expriment des motifs. C’est rassurant. On aurait pu craindre qu’ils se lèvent le matin et que, pris d’une espèce d’accès de folie, ils s’emparent d’une arme et passent à l’acte sans raison. Hélas, l’absence de cohérence est un vilain défaut. Si cette analyse assez tordue vaut pour le Hamas, elle devrait avoir une portée générale. Quel argument justifie que les tueurs du Bataclan soient qualifiés de « terroristes » ? Veut-on nous faire croire qu’ils n’avaient aucun motif ? C’est faux : ils réagissaient aux bombardements de la France en Syrie. Dorénavant, merci de les qualifier de « militants ».
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