UN MOMENT DE FOLIE COLLECTIVE
- Philippe Broda
- 7 juil. 2024
- 3 min de lecture
Dernière mise à jour : 7 juil. 2024
Dans l’effervescence antisémite actuelle, le rôle de la technologie est déterminant. Internet a accouché de réseaux sociaux qui permettent la diffusion immédiate d’images susceptibles de déverser des torrents d’émotions sur la planète entière. Face au visage ensanglanté d’un enfant, toute forme de réflexion apparaît comme scandaleuse. Mais qui dit technologie dit utilisateurs. Qui sont ces gens ?
En réalité, il existe plusieurs catégories d’individus impliqués dans le déferlement antisémite. La première est formée des « idéologues ». Ils possèdent un agenda politique précis qui peut relever d’ordres divers : islamisme, décolonialisme, communisme, anti-américanisme, antisionisme, etc… Il n’est pas rare que ces positionnements se recoupent. Leurs logiques respectives se nourrissent en effet assez naturellement. En revanche, la mobilisation d’organisations féministes est plus surprenante étant donné le recours du Hamas au viol comme arme de guerre. Les militants de ces mouvements sont extrêmement bien rodés. Parfaitement rompus aux techniques d’endoctrinement et de manipulation, ils ont préparé un argumentaire imparable qui saura jouer sur la corde sensible. La tâche n’est pas simple a priori. La charte du Hamas préconise l’extermination des Juifs dans le monde. S’il en avait la capacité, il lancerait des 7 octobre tous les jours. Et pourtant, ce sont les sionistes que l’on accuse de génocide. Admirons la performance. Students for Justice in Palestine, qui se trouve au cœur de la subversion sur les campus américains, est l’exemple type de ces vecteurs de haine.
Le cœur de cible des « idéologues » est constitué d’une autre catégorie d’individus, les « benêts ». Ce qui les rassemble est surtout leur vaste ignorance. Les manifestants qui chantent à tue-tête de libérer la Palestine « du fleuve à la mer » seraient bien en peine de préciser quelles étendues d’eau sont désignées par le slogan. Ils ne savent pas davantage qu’il préconise l’éradication de l’Etat d’Israël et qu’importe d’ailleurs. Si un Etat commet un génocide, qui se plaindra de sa disparition ? Dans le même ordre d’idée, pour les « benêts », les mains peinturlurées en rouge symbolisent des victimes innocentes. Les « idéologues » n’ont pas oublié qu’elles évoquent le démembrement de deux Israéliens par une foule palestinienne en transe en 2000. A la satisfaction de convertir le profane s’ajoute une sensation grisante de toute-puissance. En appuyant sur le bouton idoine, ils sont capables de manipuler les « benêts » à leur guise, lesquels ne demandent au fond rien d’autre. Pour eux, la mobilisation en faveur de la cause palestinienne est l’occasion de se convaincre que l’on est une bonne personne, que la vie ne se résume pas à des séries Netflix et à du tofu – même si cela reste fédérateur bien sûr. A l’université d’UCLA, les « benêts » ont exigé que l’université leur livre des repas végan pendant leur blocus.
La dernière catégorie, les « professionnels de l’information », complète le tableau. Emplis d’un sens aigu des responsabilités, ils se refusent à désespérer cette jeunesse exemplaire enfin sortie de sa léthargie. En conséquence, il n’est pas question de rétablir les faits, de rappeler qui sont les protagonistes, d’expliquer qu’Israël utilise ses armes pour protéger sa population et que le Hamas utilise sa population pour protéger ses armes. La pression des « idéologues » est forte. L’accusation de « telavivisation » de la télévision françoise de François Burgat est dans les esprits. Alors les « professionnels » essaient de rendre la foule enragée le plus présentable possible. Les déclarations d’amour au Hamas, à ses roquettes, sont passées sous silence, de même ses menaces contre les femmes sionistes qui n’ont pas fini de se faire violer. Quand l’hystérie a atteint son paroxysme lors du concours de l’Eurovision à Malmö, c’est la ferveur populaire qui a été mise en avant, pas les slogans tels que « Sinwar, nous ne te laisserons pas mourir » chantés notamment par l’inénarrable Greta Thunberg. Vite, sous le tapis…
Il n’est pas toujours aisé de classer quelqu’un dans une unique catégorie. Voyons le cas d’Esther Duflo. Elle a fait preuve d’une finesse d’analyse dans son champ d’expertise, l’économie, qui lui a valu un prix Nobel qu’elle n’a pas volé. Enseignante au MIT où elle met ses chaussettes, elle s’est autorisée à s’exprimer, moins sur un conflit sur lequel elle n’a aucune connaissance, que sur l’ambiance sur les campus américains. Sa prétendue expérience du terrain, elle la transmet dans des chroniques sur Radio France. Et que dit-elle ? Que les Juifs ne sont pas maltraités, que l’affirmer est une manipulation, une distorsion de l’information. La meilleure preuve est qu’elle a entendu des étudiants juifs s’exprimer – il s’agit en vérité de groupuscules gauchistes ultra-minoritaires. Hélas pour elle, au même moment, le débat s’est déjà déplacé. L’antisémitisme ne fait plus de doute pour personne. Durant les auditions d’une commission sénatoriale étatsunienne, la question est devenue : « appeler au meurtre des Juifs contrevient-il aux règles du MIT ? ». Alors, avec sa position, Esther Duflo est-elle une « idéologue » qui ment délibérément, une « benête » (mais est-il possible d’être bête à ce point ?) ou une « professionnelle de l’information » ? Ou les trois en même temps ?
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