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UN TEMPS CAPRICIEUX

  • Photo du rédacteur: Philippe Broda
    Philippe Broda
  • 13 sept.
  • 4 min de lecture

La saison 2 de la guerre Israélienne à Gaza continue de passionner les foules occidentales. La saison 3 est même en préparation. Sa sortie est prévue à l’automne. D’ordinaire, ce genre de série finit par lasser le public. Il est confronté à une forme d’usure. Ce n’est pas le cas ici. Le temps ne fait rien à l’affaire… comme chantait Georges Brassens.


Le cahier des charges d’une série Netflix est précis - tant de meurtres, de scènes de sexe, de rebondissements - et, en fonction de l’audience, il est amené à évoluer. Pour Israël à Gaza, c’est beaucoup plus basique. Nul besoin de scénarios alambiqués, d’intelligence artificielle en surrégime. La trame est connue à l’avance, cousue de fil blanc. Et pourtant les spectateurs en redemandent. Le tournant a été de procéder à un changement de genre. Sur les conseils de producteurs qataris avisés, la série a opéré un basculement du drame vers l’horreur. Toutefois, cette évolution n’explique pas tout. Elle est même paradoxale. La guerre entre l’Ukraine et la Russie relève du drame. Dans une série qui appartient à ce genre, des coups de théâtre se produisent avec régularité afin que l’attention du public ne fléchisse pas – à l’instar du spectaculaire clash entre Trump et Zelenski. Dans une série d’horreur, une montée progressive des frissons se produit mais, une fois que le paroxysme est atteint, une chute de tension est quasiment inéluctable. Il n’y a guère de péripéties à même de stopper ce reflux de sorte que le pire doit être réservé pour la fin.


La situation rwandaise est exemplaire à cet égard. C’est initialement un drame entre deux ethnies aux noms exotiques. Les appels de la radio des Mille Collines à tuer tous les Tutsis ont tout d’abord été pris à la légère. Les Occidentaux estimaient probablement que les massacres de masse à la hachette n’entraient pas dans la catégorie du génocide, qu’eux seuls avec leurs capacités techniques en étaient capables. Belle marque d’arrogance assurément. En revanche, une fois que la réalité du génocide a été établie, que l’horreur a été reconnue, une émotion générale a été ressentie… avant que le soufflé ne retombe assez vite. Les descriptions étaient abominables mais étaient toujours assez semblables. Même quand le brave de Villepin a tenté de relancer le sujet en parlant d’un contre-génocide, cela a fait un gros pschitt. La série obéissait à la trame du genre : il y a du sang partout sur les murs, on dresse le constat que c’est un génocide et l’on passe à autre chose dès que le public a eu sa dose d’hémoglobine. En Irak, le génocide des Yézidis a fait les titres encore moins longtemps. Il faut dire que, comme ses auteurs étaient des musulmans, l’évoquer exposait à une accusation d’islamophobie.


Dans ces circonstances, l’endurance de la passion pour le prétendu génocide des Palestiniens interroge d’autant que sa réalisation est poussive et contrevient aux règles du genre. Ainsi, l’horreur absolue est assénée dès le départ, avant même la diffusion de la bande-annonce en fait. Qui plus est, en 2014, lors de l’Opération « Bordure protectrice », le mot génocide avait déjà été employé – la courte durée de la guerre avait frustré les scénaristes. Cette fois, les médias occidentaux, qui étaient dans les starting blocks, ont immédiatement relayé l’accusation. Mais quand la barre est placée si haut dès le début, comment s’en sortir et éviter que le citoyen ne zappe ? Après génocide, on a tourné en rond avec féminicide, infanticide, écocide, urbicide qui sont inclus logiquement dans le terme. En toute rigueur, l’organisation d’une famine en fait partie d’ailleurs. Il y a quelques semaines, un communiqué outré du Hamas se plaignait de l’« agressivité » soudaine de Tsahal. Dans une narration cohérente, ce décrescendo serait problématique. Il devrait provoquer un soulèvement planétaire  des paupières : vous êtes en train de nous faire gober que l’on peut commettre un génocide sans être vraiment agressif ?


Après le poids des mots, mal mesuré, le choc des photos est censé donner consistance à l’histoire. Malheureusement, à ce niveau également, la réalisation pèche par amateurisme. Pour illustrer la thèse de la famine, la terrible image de la mère portant son bébé totalement décharné a suscité un nombre fou de tribunes scandalisées. Or l’état du maigreur du petit était lié à une maladie neurologique. On pourrait décrypter pareillement les photos les plus emblématiques de cette campagne. Bien sûr que des problèmes d’alimentation existent, que la population souffre : c’est une guerre en zone urbaine. Malgré ces défauts, pourquoi un récit si mal ficelé réussit-il à tenir le public en haleine ? La réponse se trouve dans le fond antisémite enraciné dans la culture européenne et qui est réactivé à chaque dépêche d’agence - une madeleine de Proust en quelque sorte. Cela suffit pour que les Européens adhèrent. L’antisémitisme de leurs ancêtres était sale, gluant, teinté de racisme. Le leur se veut vertueux, antiraciste. Un joli pied de nez de l’histoire. Ainsi, ce public a été ravi d’apprendre que deux cents crocodiles ont été récemment « exécutés » en Israël. Au lieu de juger cela insignifiant au regard du soi-disant génocide, il a été conforté dans son avis : ces gens ne respectent ni humains, ni animaux. Encore ! Nous en voulons encore !

 
 
 

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